Le thème de la nature morte, qui s'accorde au caractère de Cézanne et à son mode de travail, retient particulièrement l'attention de l'artiste tout au long de sa carrière.
A la suite des peintres des écoles hollandaise et espagnole, attentifs à la "vie silencieuse", Cézanne est sensible à la poésie des accessoires de la vie quotidienne. Mais davantage que les noms de Vermeer, Zurbarán ou Goya, c'est celui de Chardin qui s'impose. Ainsi, pour donner l'illusion de la profondeur, l'artiste utilise souvent, et notamment ici, le procédé du couteau placé en biais, procédé déjà emprunté par Manet à Chardin.
A côté des oignons, dont la forme sphérique se prête à ses recherches sur le volume, Cézanne représente quelques objets simples. Outre le couteau, on trouve une bouteille, un verre et une assiette. L'utilisation répétée de tels accessoires dans ses natures mortes révèle que le peintre concentre son intérêt sur l'agencement des objets, le traitement de l'espace et étudie les incidences de la lumière sur les formes.
Sur la table, Cézanne introduit, comme souvent dans les natures mortes de sa dernière période, une draperie à l'effet décoratif qui fait disparaître la construction rigoureusement établie. L'étoffe se détache, de même que la bouteille, sur un fond totalement vide et neutre qui différencie cette œuvre des autres natures mortes de la fin, davantage surchargées.
On observe également la mise en place d'un système de représentation nouveau, que Cézanne allait par la suite approfondir et qui ouvre la voie au cubisme. Alors que la bouteille ou la frise du meuble sont montrés frontalement, la perspective du plateau de table est beaucoup plus relevée : dans une même composition, les objets sont peints à partir de plusieurs points de vue.
Source : Musée d'Orsay, Paris |