dimanche 24 avril 2016

Rue Mosnier aux Paveurs, Édouard Manet

Rue Mosnier aux Paveurs, Édouard Manet
 
 
 
 
 
Rue Mosnier aux Paveurs, Édouard Manet - 1878
 

Quelques ouvriers s’affairent à repaver la chaussée, obstruant la rue Mosnier observée depuis l’atelier de l’appartement du peintre situé à l’étage élevé d’un immeuble au 4 rue de Saint Pétersbourg.

De petits personnages clairsemés vaquent à leurs occupations journalières dans une ambiance chaude, claire et vibrante, ocres bleutées ponctuées du gris noir des embrasures, de discrets réverbères et attelages. Les silhouettes des paveurs occupés à restaurer la voie à l’avant-plan représentent réellement  un obstacle, tout comme l’ouverture de la chaussée l’est pour des équipages obligés de stationner. Les blouses des ouvriers, touches lumineuses de blanc de céruse teintées de larges frottis bleutés assombris, soulignent l’inclinaison des corps en pleine action.

Véritable joyau que cette diligence, son cocher et l’animal dont les couleurs sombrent qui attirent notre regard contrastent fortement  avec le blanc de la chemise des paveurs et la lumière du milieu et de l'arrière-plan de cette rue. Une calèche en stationnement sur la gauche semble figée, deux femmes sur le trottoir qui pourraient en être descendues observent la scène. A droite, un fourgon de déménagement ou de livraison est stationné en bordure de trottoir et de petits personnages sont au travail. Le panneau publicitaire au premier plan apparait comme étranger à la nature parisienne de cet espace urbain.

Au loin de petites silhouettes semblent être attirées par les vastes taches claires en bout d’artère comme pour abandonner ce tronçon immobilisé par les travaux et le laisser à sa torpeur passagère. Un petit pan de ciel bleu, enserré entre les immeubles, vibre au lointain. Un bleu cyan tombe sur la moitié arrière et envahit le fond.

Des ombres bleutées balaient les encoignures de fenêtres, glissent sur les balustrades et inondent les façades. Les cyans sourds profonds tantôt violacés parfois ocrés coupés d’une large plage transversale d’un gris chaud se prolongent, brièvement entravés par le noir d’une calèche en arrêt pour se répandre à l’avant sous nos yeux vers les paveurs.

L’harmonie ocre, jaune pâle, bleu-violet de l’ensemble, écrin homogène, se rafraîchit du vert d’un arbre et de quelques verdures à peine esquissées sur les balcons. L’ambiance de le rue Mosnier dans un quartier parisien par un après-midi ensoleillé est d'autant plus belle et calme qu’elle est entravée. L’homogénéité de ce chef d’œuvre appelle le regard à le parcourir sans fin.

Source : un peintre, un chef d'oeuvre